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Censure et cinéma dans la France des Trente Glorieuses, par Frédéric Hervé
Censure et cinéma dans la France des Trente Glorieuses
Paris, Nouveau Monde éditions, mars 2015
collection "Document histoire"
540 pages
prix : 25€ISBN-10 2-36942-040-5ISBN-13 978-2-36942-040-8GTIN13 (EAN13) 9782369420408Extraits du livre et… en fin de notice, écoutez l'auteur dans l'émission de Frédéric Taddéi diffusée sur Europe 1 le 18 mai 2015 en direct de Cannes
Une activité censoriale parmi d’autres : la coupure
Les ciseaux sont indissociables de la figure d’Anastasie. Pourtant, l’action de la censure peut se traduire par des coupures mais aussi par des modifications stricto sensu. Un repentir, au sens où l’entendent les peintres, peut affecter la bande-son tout autant que l’image. On peut citer Je suis curieuse (Sjoman, 1967). La censure ordonne de couper l’image d’un pubis féminin mais, pour garder la séquence, le distributeur effectue « un truquage qui, par agrandissement photographique, permet de cadrer cette femme complètement nue uniquement jusqu’à la taille ». Enfin, la modification peut être un ajout.
Pour obtenir la levée d’un seuil d’âge, le producteur de Douce violence (Pécas, 1961) fait procéder à la coupure d’une scène frivole (ci-dessus) mais aussi au « tournage d’une séquence supplémentaire finissant par un mariage à l’Eglise » (ci-dessous).
Ces coupures, ajouts et modifications peuvent découler de trois processus différents. Premier cas de figure, la coupure est imposée. On fait, par exemple, disparaître l’une des protagonistes d’une scène d’amour à trois dans Désirella (Dagge, 1969). Le producteur s’exécute en protestant. Deuxième cas de figure : la coupure est proposée par l’ayant droit pour obtenir la levée d’une restriction plus grave. Les censeurs peuvent refuser ces coupures offertes comme dans le cas de Pas de printemps pour Marnie. (Hitchcock, 1963). Troisième cas de figure : la coupure suggérée. La commission prononce une restriction en la justifiant par une scène précise. Le producteur est alors libre de saisir la paire de ciseaux qui lui est tendue. La censure peut d’ailleurs aller jusqu’à présenter la coupure comme optionnelle. Ainsi, le distributeur de Haine pour haine (Paolella, 1968) doit choisir entre le seuil à 13 ans ou bien l’allègement d’un règlement de comptes, du passage à tabac du héros et d’une flagellation. Il opte pour le seuil d’âge plutôt que d’affadir son western spaghetti.
<= Part des films concernés par un motif de censure.
A la Libération, près de la moitié des restrictions prononcées par la censure ne sont pas motivées. Jouissant d’un pouvoir discrétionnaire, le censeur n’est pas tenu de s’expliquer auprès du producteur et du réalisateur qui, pourtant, implorent de comprendre ce qui leur est reproché. Par la suite, les censeurs sont devenus plus prolixes, d’autant qu’ils avaient de plus en plus de mal à se faire entendre. Au total, les 543 dossiers étudiés ont fait apparaître dix-huit motifs de censure qui dessinent la jurisprudence censoriale. Ils peuvent être regroupées en quatre catégories : la politique (subversion, guerre, diplomatie, uniformes) concerne 11 % des films de l’échantillon, la violence (gangsters, méfaits, sadisme, terreur) renvoie à 34 % des dossiers, les questions sociétales (drogue, psychisme, mœurs, famille, jeunes) touchent 18 % des œuvres et la sexualité (femmes, prostitution, homosexualité, érotisme, pornographie) apparaît dans 37 % des avis.
écouter l'émission de Frédéric Tadéi du 18 mai 2015 au festival de cannes• invité Frédéric Hervé (à partir de 1.07.53…« La collaboration, par Denis Peschanski et Thomas FontaineLa caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat et alii »
Tags : cinéma, censure, Trente glorieuses, France, histoire, commission de contrôle, Libération, sexualité, violence, politique, Giscard, Frédéric Hervé
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