• La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat et alii

    La caricature... et si c'était sérieux ?
    Décryptage de la violence satirique

    La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat, et aliiPascal Ory, Christian Delporte,
    Bertrand Tillier, Laurent Bihl, Emmanuel Pierrat 
    et alii

    Paris, Nouveau Monde éditions, février 2015
    120 pages coul.

     

    ISBN-10 2-36942-252-1
    ISBN-13 978-2-36942-252-5
    GTIN13 (EAN13) 9782369422525

    prix : 14,90€
    site de l'éditeur

    Mourir pour des dessins ? Ce danger semblait, jusqu'au 7 janvier 2015, réservé aux dictatures. La France a certes connu la répression des images : lorsqu'en 1830 Honoré Daumier affronte la prison pour son irrévérence envers la monarchie, Charles Philipon le défend en croquant le roi Louis-Philippe aux bajoues déformées en poire grotesque... Avec la renaissance de Charlie Hebdo, en une couverture plébiscitée par les Français, vilipendée dans certains pays musulmans et censurée aux États-Unis, une étape a été franchie : la caricature est réaffirmée comme bastion avancé de la liberté d'expression.
    Encore faut-il comprendre quelles transgressions sont permises en démocratie, quelles autres ne le sont pas, et pourquoi. Cet ouvrage illustré, rédigé par des spécialistes reconnus, offre à tous des clés pour décrypter la caricature. Quelle est sa place dans la République ? Quel a été son rapport avec les pouvoirs et les religions ? Pourquoi un tel raidissement actuel sur le fait religieux ? Comment distinguer l'intention humoristique de la propagande haineuse, voire raciste ?
    Puisque décrypter le dessin de presse est devenu une question de vie ou de mort, il est grand temps de nous y atteler.

    Sommaire 

    IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIMIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII

    • Avant-propos (Yannick Dehée) p. 11-13
    • Introduction (Pascal Ory) p. 15-19
    • Brève histoire de la caricature (Christian Delporte) p. 21-29
    • Une grammaire du dessin de presse (Bertrand Tillier) p. 31-39
    • Le dessin de presse comme outil de propagande (Laurent Bihl) p. 41-47
    • Les ambivalences du pouvoir et des politiques (Christian Delporte) p. 57-49
    • Le dessin de presse et les religions (Laurence Danguy) p. 59-67
    • La caricature face aux censures (Laurent Bihl) p. 69-79
    • Quand la caricature se met au service de la haine (Marie-Anne Matard-Bonucci) p. 81-89
    • La caricature a-t-elle des limites ? (Emmanuel Pierrat) p. 91-97
    • En guise de conclusion...
      « Le rire au corps. Grotesque et caricature » (Christian-Marc Bossénot) p. 99-106
    • Les auteurs p. 111
    • Crédits iconographiques p. 117

     

    Quelques extraits…

    La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat, et aliiCet ouvrage est né dans l'urgence des événements sanglants de janvier 2015. Il nous est apparu comme une nécessité : on peut donc, en France, mourir pour des dessins. Mourir sous les balles de jeunes français fanatisés qui ont pu fréquenter le système scolaire sans rien comprendre à l'image et à la liberté de regard.

     

     

     

     L'art de la caricature remonte aussi loin que l'histoire de l'Art. Il s'appuie sur des procédés qui doivent être dosés avec précision pour faire mouche. Le dessin de presse a été, au fil des siècles, une arme de propagande et d'émancipation, de combats politiques nobles et parfois douteux. En France, la caricature s'est imposée comme une tradition républicaine, puis a été protégée en grande partie parla loi fondamentale de 1881 sur la liberté de la presse. Elle est tolérée bon gré mal gré par les pouvoirs successifs qu'elle brocarde. Par définition elle ne connaît pas de limite. 

    La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat, et alii

    « De toute les armes adoptées par les Républicains, la plus redoutable, la plus cruelle et la plus efficace fut la moquerie. » En 1867, dans son Grand Dictionnaire universel, Pierre Larousse rend hommage à la caricature politique qui, sans relâche, se situe à la pointe du combat pour la liberté de la presse. À la fin du Second Empire, il est loin d'être gagné. La République balbutiante qui lui succède s'en méfie au point d'exiger que toute personne caricaturée ait, au préalable, donné son autorisation ! En 1881, enfin, la loi sur la liberté de la presse donne au caricaturiste le droit de persifler, à condition de respecter les limites qu'elle fixe en matière d'outrage, d'injure et de diffamation.

    Désacraliser par le rire

    La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat, et aliiLe mot « caricature » est tiré de l'italien caricatura, lui-même issu du latin caricare (« charger »). La caricature est une charge qui exploite les formes multiples de l'humour, visuelles ou écrites (comme l'indiquent les légendes ou les bulles), mais aussi qui, à la manière du pamphlet, dénonce, condamne, stigmatise. Le grotesque (subtil ou grossier) est un outil servant à désacraliser celui ou ce qui est l'objet de la charge. C'est pourquoi elle dérange…

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    C’est la représentation […] dans laquelle la vérité et la ressemblance exacte ne sont altérées que par l'excès du ridicule. L'art consiste à démêler le vice réel ou d'opi­nion qui était déjà dans quelque partie, et à le porter par l'expression jusqu'à ce point d'exagération où l'on reconnaît encore la chose, et au-delà duquel on ne la reconnaîtrait plus ; alors la charge est la plus forte qu'il soit possible. » C'est en ces termes que Diderot définissait la caricature dans Y Ency­clopédie. La caricature est une charge, parce qu'à l'époque moderne caricare signifiait aussi « charger une arme à feu ». Appliquée à la caricature politique considérée comme arme capable de blesser, cette acception souligne combien est douée d'une intention offensive, critique et polémique l'image satirique, dont la Révolution française a aiguisé le tranchant.

    Un irrespect sans limite

    La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat, et aliiAu sens strict, une caricature est une représentation révélant des aspects déplaisants ou risibles d'un sujet ou d'une situation, en en amplifiant des traits, des caractères ou des détails choisis. Le plus souvent, la caricature est donc une charge qui outre pour ridiculiser. La gamme de ses moyens est étendue, où se côtoient le burlesque et le grotesque, l'étrangeté et l'extravagance, la parodie et l'irrespect, qui constituent la grammaire de la caricature comme image pamphlétaire vouée à critiquer les idées reçues, les idéologies, les croyances, les institutions, le pouvoir et leur autorité. Au fond, le caricaturiste considère que rien ni personne ne saurait lui échapper et qu'en démocratie tout est caricaturable.

    <= Colombani, « Pyramide : le secret de la momie. Mitterrand est mort » [image censurée], L'Idiot international,
    n° 59, 30 avril 1991.

     

     

    La caricature... et si c'était sérieux ?, Pascal Ory, Bertrand Tillier, Emmanuel Pierrat, et aliiDans la France de l'affaire Dreyfus, on a oublié à quel point l'actualité polémique avait pu être nourrie des attaques des ligues de vertu contre les librairies ou points de vente de presse, au motif de couvertures satiriques irrévérencieuses. Au premier rang de celles-ci, la Société de protestation contre la licence des rues du sénateur René Bérenger, le « Père la Pudeur » [Morel], qui appelle en 1894 à la lutte contre le « surgissement » des images « obscènes » depuis le fronton des kiosques [Lenoble]. Dès la fin du premier conflit mondial, le harcèlement reprend avec les mises à l'index et les menaces de l'abbé Bethléem [Mollier], lesquelles poussent les surréalistes à descendre dans la rue en février 1926 pour déchirer des journaux catholiques en public. L'année suivante, la justice condamne les deux parties. Cet activisme coercitif resurgit dans les années 1970 contre Hara-Kiri ou Charlie Hebdo, du fait d'associations aussi diverses que les nouvelles ligues de vertu (l'abbé Pierre Raillard déchire dans la rue des exemplaires d'un numéro d'Hara-Kiri intitulé « La face cachée du Christ »), les anciens combattants, la Liera (pour la couverture du 24 novembre 1977 « Un bicot lèche le cul d'un youpin ») ou encore, dans les années 1980-2000, l'Agrif (Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne) et le CFCM (Conseil français du culte musulman).

     

    « Censure et cinéma dans la France des Trente Glorieuses, par Frédéric HervéColloque Viols en temps de guerre »

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